Numérique en santé : une étude internationale pointe quelques points faibles

publié le 11 septembre 2024

Les technologies numériques, y compris mobiles, ont certes fait leur apparition et ont largement investi le secteur de la santé mais, ces derniers temps, différentes études font état d’un ralentissement – ce qui peut paraître étonnant. Parmi les raisons invoquées : la pandémie Covid et ses conséquences.

C’est l’une des conclusions d’une étude internationale de SOTI, acteur français spécialisé dans les technologies mobiles et l’IoT (Internet des Objets). Ses auteurs estiment ainsi que “63 % des acteurs interrogés utilisent encore des systèmes obsolètes”, contre 46 % deux ans plus tôt.

Un pourcentage qui varie sensiblement selon les pays – question de ressenti, d’aspiration ou de situation réelle ?

Ceux qui se plaignent le plus sont les Allemands (81%). Par contre, les Mexicains ne sont que 45% à estimer travailler avec des équipements obsolètes.

Quelles sont, selon eux, les conséquences de cette inadéquation de l’équipement face aux besoins ? 37% [moyenne mondiale] évoquent une perte de temps en essayant de résoudre les problèmes ; 36% parlent d’une vulnérabilité des réseaux face aux attaques ; et 31% disent être en incapacité d’accéder rapidement aux données des patients.

La confiance en berne

D’une manière générale, l’un des constats que dégagent les auteurs du rapport est que des progrès restent nécessaires non seulement pour intégrer davantage de solutions et outils (en ce compris) mobiles mais aussi pour sécuriser, rationaliser et mieux intégrer ceux qui l’ont déjà été.

Le rapport souligne notamment une discordance : d’une part, une augmentation des investissements et la progression des projets de déploiements ; de l’autre, une diminution de la confiance accordée aux infrastructures en place.

« Le secteur de la santé en est encore à un stade où les dispositifs – et donc les données de santé – ne sont toujours pas contrôlés et gérés efficacement. Les problèmes ne sont pas automatiquement signalés et les soins à distance ne sont pas mis en place en raison d’un manque de sécurité et de fiabilité des données”, écrit notamment Shash Anand, responsable de la Stratégie produit chez SOTI.

Quelques chiffres tirés du rapport :

  • – “plus d’un quart des décideurs informatiques consacrent plus de 5 heures par semaine à des problèmes techniques”
  • – “24 % des organisations de soins de santé dans le monde éprouvent des difficultés à gérer les appareils à distance, ce qui limite leur capacité à moderniser les opérations quotidiennes”
  • – « près d’un quart des professionnels rencontrent des obstacles à l’investissement dans l’intelligence artificielle”
  • – “[une moyenne de] 23 % des décideurs informatiques citent la sécurité des données comme leur principale préoccupation, une augmentation par rapport aux 16 % de 2023”. On relève ici quelques différences selon les pays. Ainsi, les décideurs informatiques opérant dans un établissement de santé qui mentionnent plus volontiers la sécurité comme préoccupation principale exercent surtout au Royaume-Uni (33%), Canada (31%) et aux Etats-Unis (30%). Néerlandais, Allemands et Français la citent sensiblement moins (resp. 15%, 15% et 14%).
  • – “67% des établissements rencontrent régulièrement des problèmes avec les appareils IoT ou de télé-santé, ce qui entraîne des retards dans les soins aux patients”.

Les principales raisons d’inquiétude quant à la sécurité des systèmes et des données ?

Par ordre décroissant :

  • – vol potentiel à l’occasion d’une cyber-attaque (externe)
  • – atteinte à la réputation de l’établissement suite à un incident
  • – coûts financiers induits
  • – erreur de sauvegarde des données
  • – divulgation des données patient sans consentement de ce dernier
  • – perte des données patient
  • – perte ou vol de dispositifs et de systèmes, débouchant sur une divulgation des données patient
  • – accès non autorisés aux dossiers
  • – manque de formation

A noter qu’une source d’inquiétude n’apparaît pas dans ce classement. Elle n’a pas été citée spontanément alors que l’un des problèmes majeurs signalés comme problème de sécurité bel et bien vécu ces deux dernières années est… une fuite accidentelle de données du fait d’une erreur d’un employé ! Un problème signalé par 45% des répondants, à égalité avec les violations provoquées par un acteur extérieur à l’établissement Le “champion” en matière de fuites dues à un employé est ici le Canada (avec un score de 63%).

Et on ne parle ici que de fuites “accidentelles”. Auxquelles s’ajoutent encore les fuites résultant d’une action volontaire d’un employé (moyenne de 34% des signalements pour les neuf pays ayant participé à l’étude).

Le pays qui signale le plus de cas de fuites de données suite à une cyber-attaque externe ? Les Pays-Bas.

Analyse des auteurs du rapport : “À l’échelle mondiale, l’augmentation marquée des attaques et des fuites s’est considérablement accentuée depuis 2023, pourtant cela n’est pas reflété par les préoccupations de nombreux pays concernant la sécurité des données. Il est difficile de dire si cela est dû à d’autres préoccupations et priorités qui détournent l’attention des établissements de cette question. Cependant, lorsque les conséquences énumérées sont si graves, affectant à la fois l’établissement et les informations privées des patients, il est assez surprenant que la sécurité ne soit pas davantage une préoccupation centrale quand il est question d’informatique.”

L’essor de l’IA

Sur les 1.450 décideurs interrogés, 98% ont déclaré utiliser (dans une certaine mesure) ou au moins envisager d’utiliser l’intelligence artificielle au service des soins aux patients.

Principales destinations ?

  • – traitement ou l’analyse des données médicales : 60%
  • – mise à jour des dossiers des patients : 56%
  • – planification des cycles de traitement : 47%
  • – personnalisation des traitements : 44%
  • – diagnostic des pathologies : 38%
  • – utilisation administrative : 20%.

Pour réaliser son étude (en mars 2024), SOTI a interrogé 1.450 décideurs informatiques (hôpitaux, médecins généralistes, acteurs de soins d’urgence ou de télé-santé) aux États-Unis, au Canada, au Mexique, au Royaume-Uni, en Allemagne, en France, en Suède, aux Pays-Bas et en Australie.

Le rapport de l’étude “Santé et numérique : élan prospère ou survie ?” peut être téléchargé via ce lien.