Petite plaidoirie en faveur de l’interopérabilité sémantique des données et systèmes de santé

publié le 5 juillet 2024

Un acteur bien connu de la communauté du Patient numérique a été interviewé dans le cadre d’un article publié par le magazine français Hospitalia sur le thème de l’importance de l’interopérabilité dans le secteur hospitalier, et plus précisément, celle de l’interopérabilité sémantique.

Brice de Behault, cofondateur et directeur d’EarlyTracks, spin-off de l’UCLouvain spécialisée dans le traitement naturel du langage à des fins cliniques, a souligné l’importance de l’interopérabilité sémantique, nécessaire pour que les systèmes d’information “sachent se comprendre sans ambigüité” et que les données mises à disposition puissent être efficacement et correctement interprétées et exploitées.

Dans son interview, il explique l’intérêt à s’appuyer sur des normes en la matière, en choisissant celle qui correspond le mieux au “degré de granularité recherché”.

Au-delà de ce qu’il appelle une “représentation atomique de l’information médicale”, via recours à des normes telles que Snomed CT ou LOINC, il serait bon d’en arriver à une représentation standardisée de notions médicales et de leur contexte, selon le vécu spécifique du patient (son identité, la date de début ou de fin d’une condition, sa sévérité, les observations liées…). C’est là qu’entrent en jeu de nouvelles normes, plus particulièrement HL7 FHIR (Fast Healthcare Interoperability Resources).

Deux autres évolutions peuvent être envisagées, selon Brice de Behault. “D’une part, il est possible de regrouper les ressources FHIR pour décrire le patient dans son ensemble – antécédents médicaux et chirurgicaux, allergies, vaccins, etc. Des “résumés patients” s’appuyant eux aussi sur des standards, dont l’International Patient Summary (HL7 IPS) et le European Electronic Health Records Exchange Format (EEHRxF). La deuxième évolution possible va au-delà de l’échange et cherche à offrir une représentation unifiée et encore plus fine de l’information. openEHR est un exemple remarquable d’une telle normalisation et est utilisé par de plus en plus de régions en Europe. Malheureusement, il ne s’agit pas d’un standard fort diffusé, et il est donc moins tangible que HL7 FHIR à ce stade.”

La perspective d’échanges et d’exploitations de données médicales de plus en plus nombreux, divers et variés (primaire et secondaire) nécessite de mettre en oeuvre ces leviers d’interopérabilité sémantique. Sans cela, les entrepôts de données médicales (EDS, CDR…) ne seront que d’immenses dépositaires de données disparates, passant à côté de l’objectif visé.

“Pour éviter tout traitement inutile, il est pertinent de s’assurer en priorité que les contenus saisis dans les systèmes soient standardisés à la source. […] Il est également possible de standardiser des contenus repris en langage naturel à la volée ou a posteriori au travers de l’intelligence artificielle et en particulier d’outils de traitement automatique du langage naturel, ou NLP – plus précisément des applications d’IA générative ou d’extraction d’information plus classique des données.

L’interview est pour lui l’occasion de comparer les situations belge et française, avec une certaine avance pour notre pays. Mais il souligne également l’importance du rôle que l’Europe pourrait ou devrait jouer pour favoriser les avancées nécessaires.

Brice de Behault (EarlyTracks) : “Avec l’arrivée de l’Espace Européen de Données de Santé, les pays-membres ont une responsabilité importante à jouer. L’Union Européenne doit également soutenir une adoption homogène des standards d’interopérabilité et ainsi éviter le développement d’interprétations trop localisées de standards tels que HL7 FHIR – un défi appelé “profiliferation” dans le jargon.”  

Pour plus d’information sur le concept de “profiliferation, voir notamment la publication scientifique “Reducing FHIR “Profiliferation”: A Data-Driven Approach”.

L’interview de Brice de Behault est accessible via ce lien (Hospitalia, édition de mai 2024)